Un début de festival où ça chante et ça danse – Montpellier Danse 2022

 

Après tant d’années où un danseur ne pouvait s’empêcher de l’ouvrir sur scène, et si souvent de manière gênante ou discutable a minima, hé bien après le texte, le chant ! Comme si la danse, seule, n’avait plus rien à dire. Un petit peu plus tard dans la programmation du festival, Anne Teresa De Keersmaeker, Ohad Naharin, et pas qu’eux je l’espère, nous prouverons le contraire.

 

 

On chante, et bien, chez Bouchra Ouizgen, alors qu’on danse en vain.
Si les voix et percussions s’imposent, la danse est très décevante, peut-être même de trop. Pendant que les éclairages traversent superbement le plateau, les sons et chants emplissent l’espace entier faisant émerger un puissant archaïsme mais une dramaturgie simpliste fait qu’un tempo n’arrive pas à inscrire une temporalité. Plus proche d’une carte postale souvenir animée, nous restons à distance, loin d’un ailleurs.

 

Eléphant
Bouchra Ouizgen
Studio Bagouet, Agora – Montpellier
vendredi 17 et samedi 18 juin 2022

 

 

 

« Simple et direct, ça envoie ! » avait dit Philippe Decouflé, en conférence de presse, pour présenter sa dernière création, « Stéréo ».
Ça danse presque, ça gymnastique plutôt, souvent au sol, un hip-hop déstructuré. Ça chante mais surtout ça joue, de la guitare, et bien. Plus d’une heure et demie, une suite de « tableaux », comme on en faisait dans les « Opéras-rock » des années 80, s’enchaînent, ponctuée d’intermèdes comiques façon Elie Kakou, et là, comme chez les « Carpentier ».
Simple et kitsch, ça n’envoie rien de plus qu’une danse de show TV.
Ce premier jour, si on a eu chaud, on n’a pas eu de migraine.

 

Stéréo
Philippe Decouflé
Théâtre de L’Agora – Montpellier
vendredi 17, samedi 18, dimanche 19 et lundi 20 juin 2022

 

 

 

A Uzès, pour le dernier jour du festival Uzés Danse, David Wampach et sa dernière création sont co-accueillis par la manifestation gardoise et par Montpellier Danse. Et là ça danse, au-delà de la danse, et ça chante au-delà du chant.

Sur scène, David Wampach et la chanteuse-performeuse Dalila Khatir. Des origines algériennes pour l’une et l’autre, l’envie d’en fouiller l’archéologie, les déraciner. Autant tout mettre sur la table ! et cette dernière, lieu de rencontre, de partage et d’échange, est bien au centre des possibles.

Sont convoqués alors, djinns et autres fantômes ancestraux, sur des assonances de percussions entêtantes mêlées d’une voix, elle aussi, venue d’un mystérieux profond. Ça implore, ça incante, ça plasmodie, révélant la mémoire de mouvements archaïques, d’ascendances tribales, berbères comme kabyles, païennes assurément, d’une liturgie toute personnelle. Avec allégresse l’émissaire s’offre pleinement à lui, à sa quête et à nous, alors que le percussif se défait en scie lancinante, les voix résonnant en ambigus multiples. Faire émerger ses sens, faire revivre ses empreintes, renaître de ces réminiscences, ça convulsionne, ça expulse, ça mue. Magnifiquement. What a trip !

 

 

ALGERIA ALEGRIA
David Wampach
Théâtre de l’Ombrière – Uzès
samedi 18 juin 2022

Chorégraphie, costumes : David Wampach
Interprétation : Dalila Khatir, David Wampach
Lumières : Samuel Dosière
Son : Jordan Dixneuf

 

Retour à Montpellier dimanche après-midi.
On passera sous silence la soirée scandinave passée au Corum.

Jean-Paul Guarino