« Parloir » de Nairy Baghramian à Carré d’Art, Nîmes

 

 

 

Un parloir est une pièce permettant de se rencontrer, se voir et communiquer. Nairy Baghramian nous propose bien des rencontres purement visuelles qui induiront des échanges oraux, loin de tout contact physique autorisé, même si le désir s’en manifeste.

Avant d’accéder à la première salle, déjà, l’artiste marque l’espace de sa ponctuation. Le grand « crochet » jaune, parfaitement positionné sur la cimaise, au côté du texte de présentation de l’exposition, s’avère être, en fait, une virgule…

 

« Les questions non résolues persistent dans les marges, c’est pourquoi le décentrement restera le lieu des tâches sculpturales. » prévient Nairy Baghramian. Elle l’annonce et s’y attèle, sans aucun maniérisme. Cela se traduit tant par l’occupation de l’espace et l’emplacement des œuvres au sein de chaque salle que par le rôle de certaines pièces qui articulent, assistent et nous invitent à découvrir, de salle en salle, de nouveaux espaces redessinés. La traversée de l’exposition s’avère relever d’une véritable expérience corporelle qui se fluidifie tout au long du parcours, la complexité de l’œuvre s’éclairant et la rencontre s’opérant.

 

 

 

 

Dans son exemplaire personnel du Coq et l’Arlequin de Jean Cocteau, Carlo Scarpa* met en évidence l’aphorisme suivant : « L’émotion résultant d’une œuvre d’art n’a de valeur que si elle n’est pas obtenue par un chantage sentimental. », note Nairy Baghramian dans « Inversions », catalogue à paraître.

Ainsi si l’organique primaire n’est pas représenté, son idée, fortement sous-tendue, plane et ambiance les espaces. Les matériaux employés, référents des champs du design et de l’architecture, participent à la juste distance entre l’émotion et l’indicible sentiment de présence. A titre d’exemple, l’aluminium – usité aussi par Tarik Kiswanson, montré il y a peu dans ce même musée – avec sa capacité à porter reflets, métal usiné et néanmoins façonné, appelle au toucher, à la rencontre voire la complicité soit une véritable adresse à l’art et son histoire mais aussi à l’autre, nous, visiteurs.

*architecte, scénographe 30 ans durant de la Biennale de Venise

 

Jean-Paul Guarino

 

 

Carré d’Art – Musée d’art contemporain de Nîmes, Nîmes (30)
Niveau 3
Parloir

Nairy Baghramian
Commissariat de Jean-Marc Prevost
29 avril – 18 septembre 2022