Nathalie Du Pasquier en majesté au Mrac – Musée régional d’art contemporain, Sérignan

 

 

En suite à la magistrale exposition de Anne et Patrick Poirier, Clément Nouet, directeur du Mrac, renouvelle la performance d’inviter la juste artiste au juste endroit au juste moment de sa carrière.

Nathalie Du Pasquier, née à Bordeaux en 1957, se forme en autodidacte et dès 1979 s’installe en Italie, à Rome puis à Milan, où elle rencontre plusieurs designers qui la mettent sur la voie de la culture urbaine du XXe siècle jusqu’à devenir, en 1981, membre du fameux groupe Memphis. En 1987, elle décide de se consacrer pleinement à la peinture en faisant rapidement de la nature morte le thème central de sa production. Avec le temps, l’artiste remplace les objets du quotidien qu’elle représente dans ses peintures par des objets en bois qu’elle construit elle-même. Ainsi elle prend le chemin de l’abstraction, son travail actuel faisant dialoguer peinture abstraite et constructions tridimensionnelles dans les espaces d’exposition.

 

 

 

 

« Campo di Marte » est la première grande exposition personnelle de Nathalie Du Pasquier dans un musée français. L’artiste et designer française l’a conçue comme une Gesamtkunstwerk – œuvre d’art total –,
« symphonie silencieuse » selon ses propres mots, composée à partir de plus d’une centaine d’œuvres réalisées entre les années 1980 et aujourd’hui.

Pour l’artiste, le mécanisme de l’exposition est un outil dynamique grâce auquel elle peut utiliser ses œuvres comme « matière première » pour de nouvelles créations. Inclure des œuvres qui datent de plusieurs dizaines d’années et les juxtaposer avec des travaux d’autres époques lui permet de contourner les codes de la rétrospective, de s’étonner et nous étonner, et de produire une grande installation unique.
Tous les éléments constituants, assemblés selon différentes logiques ou humeurs, se répondent comme les instruments d’un ensemble musical, dans une joute colorée qui modifie notre perception de l’espace qui les entoure jusqu’à l’oublier, jusqu’à s’oublier.

L’exposition occupe les 2 niveaux du musée. Au rez-de-chaussée, tel un hyper préambule, tout est déjà là, tableaux, sculptures, dessins, maquettes, volumes et céramiques. Si ce niveau manque toujours aussi cruellement de lumière, c’est à l’étage, sous les éclairages francs des tubes fluorescents, doublés de la lumière naturelle, que la peinture de Nathalie Du Pasquier s’exprime pleinement au travers des toiles inaugurales et plus récentes, peintures murales et volumes accordés en œuvres composites dans de vives tonalités des plus réjouissantes.
Ce plaisir d’assemblage et de recomposition rejoint celui de l’accrochage, fait de justesse et de malice avec une véritable jubilation qui nous invite à une généreuse complicité, pour nous, visiteurs totalement surpris et immergés dans l’œuvre globale qu’est ce « Campo di Marte », soit un vaste espace dédié aux manœuvres, dans sa définition originale. Gardons-nous à ne pas en dire ou à en montrer plus, afin que les spectateurs à venir puissent en jouir tout autant.

 

Retournant sur nos pas, vers la sortie, frontalement notre regard rencontre celui, peut-être de l’artiste. Qui regarde qui ? En tous les cas, la traversée du super espace environnement ayant apprivoisé, séduit et définitivement activé notre œil, les regards désormais œuvrent.

 

Jean-Paul Guarino

 

 

 

Mrac – Musée régional d’art contemporain, Sérignan (34)
Campo di Marte
Nathalie Du Pasquier
Commissariat de Luca Lo Pinto
Exposition conçue en co-production avec le Macro de Rome
16 avril – 25 septembre 2022