Après la chose insuffisamment pensée de David Wampach, le complaisant divertissement d’Emanuel Gat, et l’implication a minima de Mathilde Monnier, changement de programme et de niveau, le mardi 13 octobre à Grammont au Théâtre des Treize Vents. Place à l’intelligence, l’exigence et l’engagement de Anne Teresa De Keersmaeker. Place à la quintessence de l’art chorégraphique, l’art tout court.
Les deux solistes arrivent ensemble – Anne Teresa De Keersmaeker et la danse et Pavel Koleskinov et la musique – et séparément, chacun sa trajectoire, pour occuper chacun sa place et cela durera les 2 heures de la représentation et de l’interprétation des Variations Goldberg de Bach, le temps de voir des artistes qui savent ce qu’ils font et, ce, d’une diabolique précision.
Cette précision règne à tous les étages. Le jeu, les pas, les gestes mais aussi les superbes costumes, d’une juste élégance, ne jouant ni l’outrancier spectaculaire ni la fausse modestie, les lumières, on ne peut plus subtiles, de la réflexion du monochrome écran argenté qui traversera dramaturgiquement tout le plateau, sur une diagonale de 2 heures et du plus haut jusqu’au sol, pour se réduire au rayon ultime qui illuminera une couverture de survie telle une pépite d’or, cet éclairage se conjuguant sur l’écriture de ce solo, une danse autoréflexive, l’art pour l’art, chorégraphique. Une danse qui se met à l’épreuve, d’elle-même et du temps, une danse de la cosa mentale en superbe, en rien cabalistique, une danse qui n’invente pas mais qui crée, une danse qui voudrait s’oublier voire s’évanouir mais où rien ne disparait telle une fantomatique mémoire.
Outre l’interprétation du pianiste, quelle chance d’avoir vu une artiste ainsi s’offrir !
En attendant les deux prochains spectacles – L’Homme rare de Nadia Beugré les 23 et 24 octobre et Necropolis de Arkadi Zaides les 2, 3 et 4 novembre – puis les deux derniers de cet excentrique festival, soit le Ballet de l’Opéra de Lyon / Jiří Kylián, les 16 et 17 décembre et Folia de Mourad Merzouki, les 25, 26, 27 et 28 décembre, les mordus de danse pourront arpenter la petite couronne de l’Île-de-France côté 9, 3.
Festival défricheur dédié aux écritures chorégraphiques contemporaines, les Rencontres chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis qui ont débuté le 13 octobre se poursuivent jusqu’au 12 décembre 2020. Anita Mathieu, à la direction des Rencontres depuis 18 ans et toujours aussi emplie de ses convictions, a tout mis en œuvre pour que le festival ait lieu et que les représentations soient maintenues tout en aménageant de nouveaux horaires.
Au programme, notamment, 3 créations :
The Sadness de Ula Sickle – diplômée de P.A.R.T.S, la fameuse école fondée par Anne Teresa De Keersmaeker – les 29, 30 et 31 octobre
Never twenty one de Smaïl Kanouté, le 5 novembre
Passionnément de Maxence Rey, les 6 et 7 novembre
suivront 4 solos :
Rain de Meytal Blanaru, les 13 et 14 novembre
Best Regards de Marco D’Agostin, les 13 et 14 novembre
Farmer Train Swirl – Étude de Cassiel Gaube, les 25 et 26 novembre
Sorry, But I Feel Slightly Disidentified de Benjamin Kahn, les 25 et 26 novembre
et pour terminer :
une création, un trio, daté.e.s de Pol Pi, les 10, 11 et 12 décembre
Jean-Paul Guarino