De l’art et du cochon en Catalogne, épisode 1 – Gina Trévier

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Au hasard de Facebook, j’avais été happée par ce joli cul de cochon. Me souvenant qu’une amie vigneronne et son artiste de mari avaient créé un centre d’art à Ille-sur-Têt, je décidais de découvrir ce village et de visiter quelques amis aux alentours.

 

Le vendredi 21 février, sous un soleil éclatant, je grimpe dans ma petite auto et fonce sur l’A9 en direction de Perpignan. Soudain, je ralentis face au majestueux Canigou dont les neiges se reflètent sur les eaux du Barcarès. Quelle magnifique arrivée en terres catalanes !

 

 

Première escale, Rivesaltes, connu pour son camp et ses vins. D’une nature optimiste et positive, je me contenterai de vous suggérer le lien http://www.memorialcamprivesaltes.eu/  et serai plus à l’aise de conseiller la visite de la vénérable Maison Cazes, qui constitue une excellente entrée en matière pour découvrir les vins de la région.

 

 

Chargée de quelques flacons, j’arrive chez mes amis nouvellement installés dans cette charmante petite ville. Après les embrassades et un coup de « Canon du Maréchal », blanc sec plein de fraîcheur, nous dînons. Vendredi de Carême oblige, un délicieux aïoli nous régale, il est accompagné d’un « Clos de Paulilles » dont les notes iodées et le gras du grenache sont en parfaite harmonie avec le plat. Mes amis décident de m’embarquer dans le Rivesaltes by night et me propose un verre à « L’art de la joie ». Ravie de rencontrer une descendante de Goliarda Sapienza si loin de la Sicile, quelle ne fut pas ma surprise d’entrer dans un ancien chai transformé en micro-brasserie, cave, bar et salle de concert. Là, ô joie, je bois un vin de l’excellent Domaine Gardiés. Je fais immédiatement un voyage dans le temps et me revois au siècle dernier recevant Jean Gardiés dans mon bistrot d’Issy. Il était alors un jeune vigneron timide et me présentait ses splendides Rivesaltes ambrés. Le flash-back s’arrête à la première gorgée d’un verre de « Les Millières » aux arômes de fruits noirs et mûrs, aux tanins denses mais fondus, élégant et complexe. Après enquête, je découvre que les créateurs du lieu ne sont autres que la fille et le gendre de ce grand vigneron… Bon vin ne saurait mentir !

 

 

Le samedi en fin de matinée, après moult embrassades, je pars rejoindre un copain à Perpignan. En fait il faut que je vous dise, j’avais inscrit dans mon périple un petit shopping à La Boucherie Urbaine.
Nous choisissons une énorme côte maturée ayant appartenu à un bœuf transformiste, communément appelé « Blonde d’Aquitaine » et quelques gâteries qui réjouiront notre apéritif du soir. Nous filons au marché bio tout proche où nous sélectionnons salades et légumes pour la garniture de la bête.

 

 

Ravis de nos achats, nous décidons d’aller déjeuner dans un sympathique bistrot du quartier, La Famille, où mon ami a ses habitudes. Nous demandons un vin pas trop lourd, et je découvre avec joie « L’effet papillon » du Domaine Roc des Anges, aux arômes de fruits rouges et d’épices grillés, plein d’élégance et de fraîcheur. Un grand bravo aux jeunes vignerons.
Entre les anges et les papillons, je suis sûre que nous pourrons finir la bouteille sans crainte. Ce qui fut fait évidemment, ce qui explique pourquoi j’ai complètement oublié mon entrée bien quelle fut excellente. Je présente toutes mes excuses au chef. Le plat de filets de maquereau aux panais était assurément très réussi et, lui, inoubliable.

 

 

Mon hôte étant pris par ses occupations professionnelles, je décidais de flâner au hasard dans cette ville inconnue. Zigzagant – je précise que je ne faisais que suivre les rues étroites du centre médiéval – me voilà arrivée au pied du Castillet. Emplie de courage, je grimpe le très, très, très haut escalier du donjon. Arrivée au sommet, je découvre un superbe panorama, à 360 degrés, entre mer et montagne. Je salue le majestueux Canigou et redescends sur terre. Mes pas me conduisant vers la Place Gambetta, j’entre dans la boutique des Toiles du Soleil. Dans cette caverne d’Ali Baba ultra colorée où je fouine avec délectation, je trouve le sirop de sapin de Abies Lagrimus que j’utilise pour laquer un magret de canard ou des manchons de volaille.
Au fond de la place je ne peux éviter la cathédrale Saint-Jean-Baptiste et le Campo Santo, et continuant à serpenter, j’arrive au Musée Hyacinthe Rigaud.

J’ose à peine dire que j’adore l’art baroque tant je crains d’être raillée, brocardée et bafouée par mon cher rédacteur en chef. Aussi je me suis engouffrée dans ce musée avec une joie coupable. J’apprends beaucoup de choses sur le Perpignan gothique. Je m’ébahis devant tous les beaux messieurs emperruqués portraiturés par Hyacinthe Rigaud. Je ne comprends pas ce que sont devenus les beaux-arts entre la fin du baroque et la fin du 19e siècle. Toujours est-il, je découvre avec bonheur l’abondance des créations nées de l’impulsion des artistes catalans. Remontant le temps, je finis par l’exposition temporaire « L’esprit du lieu, 20 artistes en 2020 » ceux-ci, venant d’horizons divers ont choisi d’établir leur atelier en Roussillon. Ravie de cette visite, je passe par la librairie et vois le catalogue de l’exposition du montpelliérain Dominique Gauthier, laquelle a eu lieu au cours de l’été 2019. Sauvée, je sors rassurée, JPG ne m’admonestera pas.

Reprenant ma déambulation dans les ruelles, je me dirige vers le Palais des Rois de Majorque, après la montée du spectaculaire escalier et la traversée des jardins surplombant la ville, je jouis du panorama dominé par le Canigou enneigé et me heurte à porte fermée, il est 17h30 !

 

 

Descendant vers le centre, je remarque de nombreuses demeures magnifiques dans le style des années 1920 à 50. Il est tard, je suis épuisée, j’appelle mon meilleur ami du week-end qui m’enlève dans sa puissante automobile. Retour à la casa, je déballe fiévreusement les emplettes du matin. En deux tours de mains les tapas sont prêts. Un pâté en croûte de toute beauté, un pastrami trop sage à mon goût, des rillettes de bœuf aux épices époustouflantes et une bouteille de rouge « Ego » de chez Cazes.

Requinquée, je m’attaque à la préparation de la belle Blonde d’Aquitaine et de ses légumes. La simplicité étant le vrai luxe, le dîner comprendra une petite salade de mesclum, les légumes légèrement passés à la vapeur seront jetés dans la poêle qui aura servi à la cuisson de la côte, 9 minutes de chaque côté, et qui attendra sagement d’être découpée dans le four à 80°. Pendant que je fais rôtir les légumes, Bruno découpe la viande. Hop, à table !

Pour tout savoir sur le cochon Rouxbio, il faudra patienter…

 

Gina Trévier