au sortir de Merzouki – Le Corum, Montpellier, mardi 3 février

 

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Je n’avais jamais vu le travail ou plutôt les spectacles de Mourad Merzouki. C’est fait.

La programmation de ce spectacle – Pixel – est des plus légitimes mais aussi finement stratégique. A l’instar de la redevance TV, l’argent public s’il doit servir l’art, et le protéger, doit aussi servir la culture, celle du divertissement comprise.

Une danse pauvre – d’entrée au ralenti et éclairée à la bougie, signifiants de poésie – en intermède aux numéros d’acrobatie, des effets de pixels interactifs déjà vus 15 jours plus tôt à la télé dans Robin des bois et des sauts sur des concentrations de points lumineux comme dans l’épreuve des cases de Fort Boyard auxquels s’ajoute une once de glisse pour s’éviter la prochaine venue d’Holiday on Ice, le tout sur une musique made in Cirque du Soleil – le parfait produit pour se présenter au casting de La France a un incroyable talent – c’est ce que j’ai vu.

La salle du Corum pleine à craquer, elle, a bondi de son siège à la fin du show, hurlant son bonheur, applaudissant à tout rompre. Comme les candidats de télé-réalité ou comme nombre de citoyens devant les urnes, tous veulent du « rêve ».

Peu importe les motivations des adultes, mais en s’identifiant aux interprètes et en les acclamant, les très nombreux jeunes gens présents s’auto-consacraient vedettes de la soirée et de leur propre vie.
Je repensais alors à la dernière représentation du spectacle de Philippe Quesne – La Mélancolie des dragons –, la semaine précédente à hTh. Là encore, un fort pourcentage de « jeunes » composait le public.
Ici pas de transfert à faire sur scène : Isabelle, le personnage féminin, était notre représentante – notre représentante à tous, jeunes ou pas ; incarnation de l’humanité – et y était accueillie tendrement.
Pour toute « nouvelle technologie » un vidéo projecteur de salon tenu en main, pas de pixels mais des bulles de savon, pas de performance dansée – c’est le moins que l’on puisse dire si on repense au simple demi-tour, clou de la choré – et en guise de glisse des skis Rossignol – qui méritent pleinement leur nom – sur un tapis cotonneux. Pas de « rêve » mais de quoi rêver.
Et ces jeunes gens applaudirent. Et fort. Et longuement.

A défaut de morale, bien heureusement, qu’en conclure si ce n’est le poids de notre responsabilité à transmettre et à n’en rien préjuger de ce qu’ils sont, savent et pensent ?
Ce soir, à Nîmes, est donné Tragédie d’Olivier Dubois. J’aimerais tant que la salle soit pleine de ces mêmes jeunes gens.

Jean-Paul Guarino