Chaque année, durant quatre mois, le Festival d’Automne invite à Paris et en Île-de-France des artistes de toutes disciplines du monde entier. Le Festival impulse et favorise la réalisation de leurs projets ; producteur et coproducteur, il est au cœur de la création, de la recherche et des formes multiples de l’art et présente plus de cinquante propositions venues de quinze pays.
Développant les portraits d’artistes, à l’instar de celui consacré à Robert Wilson en 2013, le Festival propose de parcourir l’œuvre de trois créateurs essentiels de ces dernières décennies : le chorégraphe américain William Forsythe, le metteur en scène italien Romeo Castellucci et le compositeur italien Luigi Nono.
Le Festival d’Automne témoigne aussi de la vitalité de la scène française. Aux côtés de Claude Régy, François Tanguy, Maguy Marin ou Pascal Rambert, arrive une nouvelle génération de metteurs en scène : Julien Gosselin, Jeanne Candel, Julie Deliquet, Vincent Macaigne, Sylvain Creuzevault, Yves-Noël Genod et bien d’autres, autant de jeunes artistes qui prennent le théâtre à bras-le-corps, recomposent leur désir du collectif et proposent de nouvelles dramaturgies. Les compositeurs Gérard Pesson, Pierre-Yves Macé et Julien Jamet rejoignent ce programme.
Cette édition nous permet de découvrir des artistes venus d’ailleurs, l’italien Alessandro Sciarroni, les berlinois de She She Pop ou bien encore l’italo-allemand Marco Berrettini, tandis que l’artiste américain Matthew Barney, associé au compositeur Jonathan Bepler, présente à la Cité de la musique une œuvre épique, démesurée et dérangeante, et qu’Olivier Saillard retrouve l’actrice Tilda Swinton. Reviennent également ces grands artistes avec lesquels le Festival entretient un lien fidèle et fraternel : Robert Wilson, Lucinda Childs, Helmut Lachenmann, Wolfgang Rihm ou Rabih Mroué.
Claude Régy
Intérieur
de Maurice Maeterlinck
Maison de la culture du Japon à Paris
du 9 au 27 septembre
Sylvain Creuzevault
Le Capital et son Singe
d’après Le Capital de Karl Marx
La Colline – Théâtre national
du 5 septembre au 12 octobre
Sylvain Creuzevault est devenu une référence pour tout collectif d’artistes désireux d’inventer une manière conviviale, politique et offensive de travailler le théâtre aujourd’hui. Ce statut privilégié est né, en partie, du succès de ses précédentes créations, au rang desquelles Notre terreur (présenté à La Colline – théâtre national avec le Festival d’Automne à Paris en 2009) qui réussissait le coup de force d’empoigner un pan entier de l’Histoire de France (plus précisément de son héritage révolutionnaire) avec un mélange inédit de plaisir ludique, de hargne politique et de décontraction bon enfant. Il présente aujourd’hui, à l’issue de plusieurs mois de résidence avec une vingtaine de collaborateurs, Le Capital et son Singe d’après Le Capital de Karl Marx. Ce gigantesque monument de l’histoire des idées, dont l’adaptation aurait déstabilisé plus d’un metteur en scène, a inspiré à Sylvain Creuzevault une « comédie, pure, dure ». Pas de visée moralisante, de glose autour de l’utopie ou de dissertation sur le « théâtre politique ». Pas question non plus d’héroïser la figure de l’ancien ouvrier ou celle du propriétaire foncier… Non : leur perspective, selon les mots de cet énigmatique metteur en scène, « consiste non pas à aimer les hommes mais ce qui les dévore ».
Robert Wilson
Les Nègres
de Jean Genet
Odéon – Théâtre de l’Europe
du 3 octobre au 21 novembre
Vincent Macaigne
Idiot ! parce que nous aurions dû nous aimer
d’après L’Idiot de Fiodor Dostoïevski
Théâtre de la Ville
1 au 12 octobre
Théâtre Nanterre – Amandiers
du 4 au 14 novembre
Julien Gosselin
Les Particules élémentaires
d’après Michel Houellebecq
Odéon – Théâtre de l’Europe / Atelier Berthier
du 9 octobre au 14 novembre
Romeo Castellucci
Go down, Moses
Théâtre de la Ville
du 4 au 11 novembre
Philippe Quesne
Next Day
Théâtre Nanterre – Amandiers
du 7 novembre au 14 décembre
Angélica Liddell
You are my destiny (Lo stupro di Lucrezia)
Odéon – Théâtre de l’Europe
du 3 au 14 décembre
Pascal Rambert
Répétition
T2G – Théâtre de Gennevilliers
du 12 décembre au 17 janvier
Yves-Noël Genod
Rester vivant
Théâtre du Rond-Point
du 16 au 31 décembre
______________________________________________________________
Matthew Barney
River of Fundament / Film-Opéra
Un film de Matthew Barney et Jonathan Bepler, écrit et réalisé par Matthew Barney
Musique composée et dirigée par Jonathan Bepler
Cité de la musique
vendredi 24 et samedi 25 octobre
Durée : 5h15 plus deux entractes
En anglais surtitré en français
L’écrivain américain Norman Mailer avait lui-même donné à Matthew Barney son roman de 1983, Ancient Evenings, espérant que ce matériau deviendrait source d’inspiration. Son geste fut le point de départ de River of Fundament, un film qui mêle cinéma, opéra et performance, librement inspiré de la relecture provocante que Mailer proposait du Livre des morts de l’Égypte antique. La scène centrale de River of Fundament est une étrange veillée funèbre pour Norman Mailer (disparu en 2007). Autour d’elle viennent se greffer d’autres moments tirés des performances filmées que Matthew Barney avait orchestrées en 2008 à Los Angeles (REN), en 2010 à Detroit (KHU) et en 2013 à New York (BA). Elles évoquent la vie, la mort et la réincarnation, en une saisissante surimpression des mythes égyptiens et de l’Amérique contemporaine : c’est ainsi qu’Osiris peut devenir une Chrysler Imperial dont le métal fond tandis que joue une fanfare d’ouvriers sous la pluie…
La première mondiale de River of Fundament a eu lieu à la Brooklyn Academy of Music le 12 février 2014.
Eszter Salamon
Eszter Salamon 1949
Jeu de Paume
du 14 octobre au 9 novembre
Mêlant performance, travail documentaire et auto-fiction, Eszter Salamon multiplie les perspectives sur la construction fragile et perméable de l’identité. Les versions d’elle-même et de ses doubles qu’elle élabore repensent ensemble le medium et le matériau, le corps singulier et la parole qui sert à le circonscrire. Un corps, mon corps – territoire en friche, inconnue singularisée par un nom, fouillis de souvenirs, de faits, de sensations : comment rendre compte de ces multiples strates, et dresser une carte qui permette son appropriation ?
_______________________________________________________________
Créée en 1990 pour le Ballet de Francfort, Limb’s Theorem est l’une des pièces phares de William Forsythe.
Théâtre du Châtelet
du 4 au 6 septembre
En 1995, le chorégraphe Jérôme Bel signait Jérôme Bel, pièce au dénuement radical, ramenant l’auteur à sa signature et la danse à ses conditions de possibilité : de la lumière, de la musique, et des corps. Dix-huit ans après, le constat résonne avec la même évidence : « on ne peut faire l’économie d’un corps ».
La Commune – Centre dramatique national d’Aubervilliers
du 24 au 27 septembre
Boris Charmatz
manger
Théâtre de la Ville
du 29 novembre au 3 décembre
Spectacle créé le 23 septembre 2014 à la Ruhrtriennale
Boris Charmatz soumet la danse à des contraintes formelles qui redéfinissent le champ de ses possibilités : canon potentiellement infini de gestes dans Levée des conflits, corps d’enfants inertes, animés par des adultes dans enfant… La scène lui sert de brouillon où jeter concepts et concentrés organiques, afin d’observer les réactions chimiques, les intensités et les tensions naissant de leur rencontre. Avec manger, c’est le centre de gravité du mouvement qui se trouve déplacé : comment mouvoir le corps non à partir des yeux, des membres, mais de la bouche ? Faire de cette béance un cadre perceptif à part entière ? Carrefour où se mélangent nourriture, voix, souffle, mots, salive, la bouche est un lieu de circulation où l’intérieur et l’extérieur, le moi et l’altérité se rencontrent, se goûtent, se jaugent, s’échangent, s’ingèrent. En saisissant cette métaphore comme moteur chorégraphique, Boris Charmatz balise un champ général de l’oralité : pâte mâchée, avalée, la matière physique se fait mixture proliférante. Ça bouffe, ça chante, ça se goûte, s’entremêle, ça rayonne de bouche en bouche jusqu’à envahir tout l’espace. Dans ce mouvement continu d’ingestion surgissent des mélodies mastiquées, des tableaux de chair, des sculptures de voix, de nourriture et de peaux, esquissant un horizon collectif et sensuel. À la frontière de l’installation mouvante et de l’objet sonore indéterminé, manger est un « réel avalé », une utopie déglutie : une lente digestion du monde.
Claudia Triozzi
Boomerang ou le retour à soi
T2G – Théâtre de Gennevilliers
du 5 au 15 novembre
« L’autobiographie mélange les genres, les voix, les naissances, les âges. La question révèle ses sens, et ouvre des possibles. Interpréter encore “là”, où l’on pose la limite de ce que l’on est, où la réponse ne pourra être une affirmation. Une scène s’ouvre à soi, inattendue. » (Claudia Triozzi)
Maguy Marin
BiT
Les Abbesses
du 30 octobre au 15 novembre
Alessandro Sciarroni
UNTITLED_I will be there when you die
Centre national de la danse
du 13 et 14 novembre
Le Monfort
du 18 au 22 novembre
le CENTQUATRE
du 26 au 30 novembre
Chorégraphe et metteur en scène, Alessandro Sciarroni fabrique d’intrigants objets scéniques à la frontière entre danse, performance et rituel anthropologique. Le corps lui sert tout à la fois de support, d’outil d’analyse et de cobaye : éprouvant sa résistance, sondant ses limites, il branche son énergie sur des contextes hétérogènes, afin de brouiller sa perception et d’élargir ses possibilités d’action.
Lucinda Childs
Dance
Théâtre de la Ville
du 17 au 25 octobre
Dance – son titre le dit assez – n’est que danse : la recherche d’une composition chorégraphique qui ne serait rien d’autre que ce qu’elle fait : le perpétuel engendrement de la forme par le mouvement des corps. Créée en 1979, elle constitue dans l’histoire de la danse un moment de synthèse – combinaison de l’épure de la danse minimaliste et de l’intense collaboration avec la scène musicale et artistique de l’époque. Sur une musique de Philip Glass et un dispositif filmique de l’artiste Sol LeWitt, Lucinda Childs invente une danse du flux – où viennent se rejoindre son travail avec Merce Cunningham et ses expérimentations au sein du Judson Church Theater. Remontée et restaurée, cette nouvelle version de Dance dévoile un écart temporel – le film laissant entrevoir les fantômes des danseurs d’origine, dont le solo dansé par Lucinda Childs elle-même.